Par Véronique VIDAL
Etre hôtelier, propriétaire d’une chambre d’hôte, ou à la tête d’un camping relève aujourd’hui du grand écart ! Les comportements, les attentes des clients et, de fait, les métiers ont beaucoup changé, mais finalement la bonne volonté est là, la maîtrise de son métier est là, l’expérience aussi, et pourtant parfois on ne sait plus où donner de la tête. Dans un foisonnement d’outils, d’actions, de prestataires, les vraies questions ne sont-elles pas : Et pour mon business, à moi, avec les moyens que j’ai, le temps que j’ai, qu’est-ce que je dois faire ? Où dois-je mettre mon énergie ? Quelles sont les actions prioritaires ? etc… Il ne s’agit pas de créer « une usine à gaz », juste des choses biens, propres, organisées, possibles, efficaces. L’enjeu pour une entreprise aujourd’hui est de faire le tri, de hiérarchiser.
Arrêtons de penser « outils » et pensons « stratégie » !
La première étape consiste à faire un peu d’auto critique, ce n’est pas le plus facile, mais une démarche tellement enrichissante.
Nous avons tous le même travers : on ne voit plus les choses qui sont devant nous depuis des années, donc avant toute chose chaussons une nouvelle paire d’yeux et faisons un peu le tour du propriétaire. L’exercice ne serait pas complet, si on ne prenait pas le temps de se comparer, en effet, je me trouve formidable, mais le voisin concurrent n’est-il pas tout aussi formidable ? Voire meilleur…
En marketing, on appelle cela un diagnostic, comme chez le médecin, oui, car avant de commencer à mettre en place des choses faut-il savoir là où le bât blesse, avant de savoir où aller faut-il savoir où je suis, avant de me soigner faut-il savoir de quoi je souffre.
Le diagnostic ne doit pas se focaliser uniquement sur son offre, mais sur un ensemble de critères permettant d’avoir une bonne vision de l’état actuel de l’entreprise :RH,CA, marges, politique prix, taux de fidélisation, visibilité, ….
Un excellent moyen de travailler ce diagnostic est de faire appel à des personnes extérieures à vos établissements, qui ont un regard vierge, et seront donc plus critiques. Vos structures institutionnelles peuvent parfois prendre ce rôle, dans le cadre de l’obtention d’un label qualité, par exemple.
Il est fondamental de comprendre que chaque entreprise est différente et qu’il n’existe pas de solutions universelles, mais bien des solutions en fonction des volontés, objectifs, structures, moyens… de chacune.
Un jeune couple qui reprend un camping ne fera pas la même chose, que cet autre qui souhaite vendre sa structure dans un délai de 2 ans, ou encore celle-ci qui souhaite avoir un revenu complémentaire sur sa retraite et continuer à avoir une vie sociale en ouvrant une chambre d’hôte. C’est d’ailleurs dans ces différences que souvent se trouve un début de solution…
Le marché dans lequel évolue l’entreprise a bien changé, s’est complexifié.
Avec tout d’abord la concurrence qui est désormais mondiale, lorsqu’une famille parisienne veut partir en vacances pour du farniente, elle peut tout aussi bien aller chez nous en Languedoc Roussillon ou sur les côtes Thaïlandaises, Mexicaines, ou encore aller en Croatie.
Vaste marché effectivement qui avec la révolution numérique, donc l’information, est accessible à tous.
L’offre c’est aussi, si nous restons dans l’univers de l’hébergement, tous les offreurs qui permettent de …. dormir ! Des acteurs tels que Airb’N’B, qui fait beaucoup parler de lui, est évidemment un concurrent, certains diront : « ha mais ce n’est pas pareil ! » lorsque quu’n consommateur consomme chez lui, il ne consomme pas chez vous ! Il est donc intéressant de se préoccuper du consommateur, qui lui cherche des solutions à ses vacances mais qui a de nouvelles exigences, on l’appelle d’ailleurs depuis quelques années le « consom’acteur », il est exigeant, curieux, il a une façon de consommer réfléchie, il a des opinions, qu’il exprime. Et surtout il gravite dans un univers d’hyper consommation ou le volume et le trop plein d’offres le blase, la banalisation de l’offre l’ennui.
Bref, il n’est pas facile d’évoluer dans ce contexte, pas facile de se faire rémunérer par le marché. Or c’est le nerf de la guerre, que le marché me génère de l’activité qu’il permette de me rémunérer.
Je veux que le marché me rémunère ? Alors je dois apporter de la valeur sur le marché ! C’est d’un « deal » dont nous parlons, vous voulez de l’argent, vous devez proposer quelque chose qui a de la valeur. Réflexion sur la notion de valeur : plus quelque chose est rare plus il a de la valeur, la notion de valeur est très personnelle, quelque chose a de la valeur pour l’un, mais pas pour tel autre.
Cette réflexion nous amène à 2 notions marketing fondamentales :
- le positionnement,
- la cible.
Il s’agit de 2 décisions que l’entreprise doit prendre, ce n’est pas un état de fait, ce n’est pas dicté par le marché, …. NON, ce sont des décisions que vous devez prendre ! Tout d’abord le positionnement et essayez de répondre à ces questions :
- Pourquoi est-ce que j’irais chez vous plutôt que chez votre concurrent ?
- Qu’avez-vous de plus que les autres ?
Attention, il ne s’agit pas de lister les services divers et variés que vous offrez, ni de parler de votre belle région : votre concurrent est sur le même territoire, ou un nouveau peut venir s’y installer !
Quand un internaute vient sur votre site, soit il reste, soit il repart tout de suite. Il ne restera pas parce que vous avez 3 pages de services divers, il restera parce que ça lui « a parlé », il « s’est senti concerné », parce que « vous ne racontez pas la même chose que le voisin ».
Il s’agit de votre valeur ajoutée en 3 mots, il s’agit de votre personnalité, on doit la retrouver partout, tout le temps.
Trop de professionnels attendent de leur prestataire web par exemple (prestataire technique) des conseils de contenus, d’éléments à mettre en avant… comment voulez-vous qu’il sache mieux que vous qui vous êtes ? Comment voulez-vous que les clients sachent ce que vous avez de plus que les autres si vous-même ne le savez pas. Cette question doit être au centre de vos décisions.
Sans positionnement vous êtes un parmi tant d’autres, avec un positionnement vous commencez à sortir du lot, à apporter plus que des lits et un petit déjeuner.
Cela donne une ligne directrice dans les actions à mener, les directives à donner au prestataire web deviennent plus concrètes, une ligne éditoriale Facebook se dessine et s’il y a des investissements structurels à faire, ils doivent venir contribuer à ancrer un peu plus ce positionnement.
Dès lors que l’on définit, que l’on formule son positionnement, on a une valeur plus forte, certes, mais seulement pour une certaine catégorie de personnes. Mon marché s’est donc réduit en volume. Moins de personnes sont concernées par mon offre, c’est là la source de toutes les angoisses : « déjà que j’ai du mal à vivre en correspondant finalement à tout le monde, comment vais-je m’en sortir en réduisant mon marché ? »
C’est un paradoxe clairement, mais c’est pourtant la stratégie de survie. « Tout le monde, c’est personne ». L’enjeu est donc de cibler ses actions et d’aller chercher la population la plus susceptible de me consommer, et d’arrêter de compter sur la venue naturelle de vos clients : vos clients viendront car vous serez allé les chercher. La population cible va donc trouver dans votre offre, une offre qui lui est dédiée et payera donc plus pour ces spécificités. Donc oui, en ciblant on réduit son marché, mais on augmente la probabilité de consommation, et on augmente ses marges. Il faut juste oser.
En restant sur un marché généraliste, en ne proposant rien de plus au consommateur, on ne lui donne pas d’autres solutions que de choisir en fonction du prix, puisque qu’il n’y a pas d’autres éléments différenciant, et que le seul besoin satisfait est « dormir dans un lit » , alors bien sur le consommateur va prendre le moins cher, il n’est pas complètement idiot. Charge à vous de lui montrer que vous méritez que l’on dépense plus chez vous, pour une valeur ajoutée que vous apportez. Non, les consommateurs ne cherchent pas que des prix, ils cherchent le prix juste. A propositions égales ils prendront bien sur le moins cher, sortez de ce schéma, et ne soyez plus « à proposition égale », proposez autre chose qu’un lit et un petit déjeuner, proposez une ambiance, un voyage dans le temps….
La solution ne réside pas dans la baisse perpétuelle de vos prix, il y aura toujours quelqu’un qui fera moins cher que vous, cessez de tuer votre marché, vous éduquez mal vos clients, on en est arrivé à un stade ou lorsque, en tant que client, on paie le prix normal, on a le sentiment de se faire arnaquer, c’est un comble !
En ayant répondu à ces questions, en ayant pris les décisions nécessaires, alors le choix des actions devient plus facile. Il s’agit en effet de constamment véhiculer son positionnement auprès de notre cible.
Tous ces prestataires qui veulent vous vendre des solutions magiques, tous ces outils qui existent sans parler de ceux qui vont exister demain, le discours qui veut « que ce soit une opportunité formidable, car je vous offre le prix de bouclage », ou tout autre argument sur la bonne affaire à ne pas rater, n’ont aucun intérêt et seront toujours trop chers, si cela ne nourrit pas votre stratégie, si cela ne véhicule pas votre positionnement ou ne touche pas votre cible.
La qualité d’une action, d’un support ne s’évalue pas à son coût brut, mais à la cohérence avec votre stratégie. L’exercice reste très délicat et bien entendu, le marketing n’est pas une baguette magique. Par contre, seuls survivront ceux qui parviendront à aller chercher leurs clients, à capter une population via de la valeur ajoutée et qui pourront donc maintenir voir augmenter leur marge.
A vous de jouer !